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Pourquoi avons-nous un Code Du Sport Plongée en France ?

Publié le 28 décembre 2017

Réflexion sur le Code Du Sport Plongée

Suite à mon premier billet d'humeur, sur la mouture 2012 du code du sport, j'ai pu constater que les arrêtés plongée généraient toujours et encore du mécontentement et de nombreuses interrogations, mais aussi beaucoup d'interprétations de la part des plongeurs Français et plus surprenant également de la part de nos amis frontaliers Suisses, Belges, Allemands, Anglais ou encore Espagnols et Italiens.

De tous les sports concernés par le CDS (environ 200) seul une dizaine (cayonning, alpinisme, parachutisme, voile, ski, plongée, etc.) bénéficient d'un accueil particulier. Cependant, on peut constater que la plongée a droit à un traitement de faveur exceptionnel qui reste inexpliqué... En apparence !

Inexpliqué, car le législateur ne s'est pas contenté, comme pour les autres sports, de rester sur des généralités, mais il est entré en profondeur et dans le détail de l'activité que seul un spécialiste peut appréhender. Effectivement, le CDS plongée ressemble à une véritable encyclopédie de la plongée avec un ensemble extrêmement large de composants techniques propres à l'activité. Cela va des banalités (définition d'une palanquée, équipement du plongeur, définition d'un mélange, valeurs des pressions partielles admissibles, etc.) communes à toutes les organisations de plongée (françaises ou étrangères) et d'autres plus pointus (bien souvent propre à la France) que l'on retrouve uniquement dans les manuels d'apprentissage pour les niveaux d'encadrement et/ou de plongeur confirmé (confection des mélanges, notion de DP et fonctions, les espaces d'évolution, description de la pléthore d'aptitudes et brevets avec les prérogatives, etc.). Cette réglementation complètement décalée et discordante, vous explique pas à pas, tel un manuel, comment organiser et pratiquer votre activité !!!

Inexpliqué également, car aucune statistique ni étude sérieuse d'aucune sorte ne viennent étayer l'origine de cet arsenal législatif. Nous n'avons d'ailleurs pas plus de chiffre ou de retour d'information pour confirmer que le CDS plongée a apporté une plus-value ou de quelconques améliorations en matière de sécurité ou de protection des pratiquants. On baigne dans une profonde nébuleuse dont personne n'est capable d'en évaluer les bénéfices.

Imaginez qu'en voile le législateur impose un niveau obligatoire (avec brevet ad hoc) pour sortir en bateau fonction de l'intensité du vent (échelle de Beaufort). À l'entrée; de chaque centre de voile, serait placardé un superbe tableau mettant en relation le brevet minimum requis avec l'indice de force du vent correspondant. De plus, la règlementation imposerait d'avoir un coéquipier également détenteur du brevet minimum requis et tout cela sous la tutelle d'un organisateur (dûment certifié) qui aura la charge et la responsabilité d'en contrôler le strict respect. Un non-autonome (fonction du vent du moment) pourrait gagner 1 ou 2 indices de vent suivant l'équipier embarqué (brevet faisant foi). Et bien sûr, tout cela sans oublier l'équipement obligatoire à bord pour partir en autonomie ou encadré. Le pratiquant n'aura d'ailleurs pas omis de déposer son plan de navigation (avec heure de départ, durée et trajet estimée, etc.) avant de partir à l'aventure.

He oui, cela vous fait largement sourire, mais il est certain qu'aucun voileux n'accepterait un tel déploiement de contraintes. Et pourtant, qu'est-ce qui pourrait empêcher nos fonctionnaires de se prendre subitement d'une méchante envie de restreindre l'espace de vie des passionnées de navigation. Comme constaté en plongée, le législateur n'a nul besoin de justifier de la mise en place de nouvelles règles et guère plus d'en prouver l'efficacité. C'est d'ailleurs bien là un point choquant, et même très inquiétant.

Cet exemple avec une autre activité nous permet un peu de comprendre pourquoi les nombreuses moutures du code du sport (et de ses prédécesseurs) plongée ont toujours fait couler beaucoup d'encre en lien direct avec l'incompréhension suscitée par de nombreux articles n'ayant pas leur place dans une règlementation, mais aussi par des textes confus, mal rédigés, ambigus et/ou trop restrictifs.

Tout ceci aurait presque pu passer inaperçu dans un microcosme qui vit en autarcie, mais avec l'ouverture de l'Europe et les premiers échanges que nous pouvions avoir avec nos voisins, les plongeurs français purent comparer et en corollaire se poser d'innombrables questions. Très rapidement la règlementation plongée qui apparaissait, à ses débuts, comme nécessaire évolua insidieusement vers un carcan administratif dont-il allait devenir difficile de s'extirper.

Pour cet article mon objectif initial était d'identifier et de critiquer les paragraphes du CDS qui posent problème ou freinent la pratique de notre activité, mais je me suis rapidement rendu-compte que le sujet était bien plus large et concernait non seulement le CDS dans sa composante technique, mais aussi d'un point de vue plus philosophique. La devise de la République française fait référence à la liberté et à l'égalité, mais s'il y a une activité ou ces termes n'ont pas cours, c'est bien la plongée sous-marine.

La plongée est la seule activité dans le Code Du sport (tous sports confondus) à s'accaparer une vingtaine de pages quand les autres s'en octroient tout au plus une ou deux. Est-ce la conséquence d'une phobie irraisonnée du législateur ou alors y aurait-il d'autres raisons plus subtiles voire perverses ? C'est ce que nous allons essayer de découvrir.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, je vous propose de lire un article de Jean-Christophe Lapouble, avocat en droit du sport, qui nous retrace un peu l'historique de la réglementation des APS (Activités Physiques et Sportives) et plus particulièrement l'origine des qualifications pour l'encadrement dans les activités de plein air. L'histoire est riche d'enseignements et nous permet souvent d'apporter la lumière sur des évènements qu'il est difficile de comprendre dans un contexte contemporain.

Pour ceux qui ne souhaitent pas prendre le temps de lire l'article, j'ai relevé deux phrases pour résumer la pensée de l'auteur :
Il apparaît que le choix de la mise en place de diplômes spécifiques ne relève pas d’une logique de sécurisation des pratiques, mais bien de la sécurisation des intervenants déjà installés, soit organisés en corporations (syndicats de professionnels), soit organisés autour d’une fédération.
La France a le plus grand mal à respecter le principe de liberté de circulation des travailleurs prévu par le droit de l’Union européenne dans le domaine de l’enseignement des sports de nature. En effet, son marché est quasiment fermé aux étrangers sans qu’il ne soit possible d’évaluer les bienfaits.

Pour la bonne compréhension du lecteur, il me semble également important de préciser le contexte du sport en France.
Le modèle sportif français repose, depuis 1945 (dérivé du régime de Vichy datant de 1941), sur une gestion commune entre le mouvement sportif, représenté par les fédérations sportives nationales et l’État représenté par son Ministère en charge des Sports. Dans ce cadre, la plupart des fédérations sportives sont investies d’une mission de service public dès lors que l’État leur donne un agrément ministériel. La délégation de l'état, confère aux fédérations un monopole exclusif sur l’organisation des compétitions sportives. Toutefois dans les faits et dans les pratiques, la tutelle fédérale excède très largement le strict domaine des compétitions et octroie également un pouvoir fédéral sur l'ensemble des acteurs de l'activité qui se trouvent totalement dépendants, et cela même pour des activités où la compétition est, par définition, proscrite comme la plongée.

Après cette première mise en bouche revenons maintenant à des sujets plus contemporains. Dans les années 90 et 2000 beaucoup de professionnels locaux de la plongée voyaient d'un très mauvais œil la forte progression de la concurrence égyptienne. Avec l'apparition de la menace djihadiste (fin des années 90 commandités par Al-Qaïda et qui ont ensuite continués dans les années 2000, suivies par le printemps arabe en 2011) les centres Français eurent l'espoir de récupérer cette manne qui partait à l'étranger. Malheureusement, le transfert s'orienta plutôt vers les pays du sud de l'Europe comme l'Espagne, l'Italie, la Grèce et par la suite jusqu'aux pays de l'est aux abords de l'adriatique. Les plongeurs Allemands, Hollandais, Belges, Anglais que l'on avait l'habitude de croiser en Egypte se déportèrent vers ces mêmes destinations au détriment du sud de la France et particulièrement la Provence-Côte d'Azur. De la même façon, la passion grandissante des plongeurs français pour les voyages et les destinations exotiques les amenèrent également à migrer doucement vers ces destinations réputées pour leur meilleur rapport prix/prestation. Rapidement, cela permit à nos compatriotes de comparer et de découvrir une autre façon de plonger, beaucoup moins restrictive, et surtout moins égocentrique.

Avec le temps, la question sur l'intérêt réel et le pourquoi du code du sport s'est souvent posée. Ceci est d'autant plus vrai que nous devons malheureusement constater qu'une profonde omerta perdure dans notre microcosme sportif au profil d'une minorité et que sur bien des sujets, il est (et a toujours été) extrêmement difficile de connaître les véritables raisons qui ont dicté les choix mis en place. En effet, beaucoup de règles nous sont imposées sans réel fondement et surtout amènent une complexité extrême et son lot d'interrogations, mais aussi avec autant d'interprétations qu'il existe de plongeurs sans parler des forces de l'ordre et autres inspecteurs en mer ou à terre qui se voient obligés d'en contrôler la bonne application pour notre plus grand bien nous dira-t-on !

À la lecture de notre code du sport et au vu de l'étendue des sujets abordés, un néophyte pourrait presque assimiler ces articles à un véritable mode d'emploi de la plongée plutôt qu'à l'énoncé de quelques règles définissant le cadre d'une pratique sportive... soit-elle à risque !
Mettez le CDS dans les mains d'un néophyte ou d'un plongeur étranger francophone et les premiers mots qui lui viendront à l'esprit vous donneront rapidement un aperçu de la perception qu'il peut en avoir : imbuvable, incompréhensible, délirant, complexe, etc. D'ailleurs en plongée, s'il y a bien un qualificatif partagé par toute la communauté des plongeurs de France (et d'ailleurs) c'est bien la complexité du CDS.

En fait, quel est le véritable problème ou plutôt les problèmes car ils sont nombreux ?
Une première remarque que l'on pourrait formuler sur la rédaction du CDS serait la non-distinction de ce qui est du ressort des règles générales et de l'état de l'art de l'activité. L'état de l'art est défini par les experts de l'activité, c'est-à-dire par les organisations de plongée alors que les règles d'ordre général applicables à tous sont du ressort de l'état. Par définition, l'état de l'art évolue avec la technique, la technologie et la pratique ou culture propre à chaque organisation ou pays. L'état de l'art ne peut pas être figé et doit même être en continuel mouvement au gré des évolutions dans tous les domaines qui touchent à l'activité. La réglementation qui, de par sa nature, impose un long processus administratif ne peut que très difficilement évoluer et doit donc se restreindre à un cadre général avec des limites à ne pas dépasser et que l'on sait immuable à long terme et indépendamment de la manière de faire.

Tout le monde connaît l'expression : "Tous les chemins mènent à Rome", mais tout le monde n'a pas envie d'emprunter le même chemin pour y arriver !

Une réglementation doit donc fixer les limites techniques, applicables à tous, de ce qui est autorisé et ne l'est pas (exemple : les profondeurs max, les diplômes, les écoles reconnues, etc.) mais ne doit en aucune manière venir imposer une façon de faire ou des méthodes propres à une école. Sauf exception, nul besoin également de fixer des règles connues et adoptées par toutes les organisations de plongée au monde. L'organisation de l'activité, les bonnes pratiques, les limites évolutives de la technique doivent rester flexibles et donc dans le giron des organisations de plongée qui sont les garantes du maintien de l'état de l'art au meilleur niveau en accord avec la connaissance du moment. Il va de soi que l'état de l'art ne doit pas être l'apanage d'une seule entité, mais défini, partagé et accepté par tous les acteurs de l'activité.

La technologie ainsi que nos connaissances scientifiques, technologiques, physiologiques évoluent au fil du temps et la réglementation ne doit pas en entraver ou limiter les développements.

Autre point important qui doit caractériser une réglementation est sa simplicité, sa concision et limpidité. Elle ne doit pas être interprétable et accessible, sans ambiguïté, à tout le monde et avec des termes précis. Dans tous les cas, elle n'est surtout pas là pour apporter de la confusion.

Analyse de la situation française et constats

Les gouvernements successifs ont souvent eu, dans différents domaines, la bonne idée de prendre en référence les us et coutumes à l'étranger pour essayer de nous convaincre que les mesures qu'ils souhaitaient instaurer vont dans le bon sens. Cette démarche reste, bien sûr, très usitée pour les sujets dont les résultats s'avèrent incontestablement positifs dans les pays ou est effectuée ladite comparaison. Pour les autres cas de figure, comme la réglementation de la plongée, nos têtes pensantes se passeront évidemment de faire un quelconque parallèle. La raison en est extrêmement simple comme vous allez pouvoir le constater.

La première démarche est donc d'aller voir ce qui se pratique chez nos voisins proches ou même éloignés (soyons fou !). En relation avec notre domaine d'activité, un rapide constat nous confirme que notre code du sport reste unique en Europe voire également dans le monde.


Au-delà de l'Europe, les principales destinations exotiques d'Afrique ou d'Asie reconnues pour leurs spots de plongée ne proposent guère plus de réglementation que ce qui se fait dans la (très) grande majorité de l'Europe (comprendre toute l'Europe sauf un petit pays gaulois). J'exclus, bien sûr, de mes remarques les territoires ou départements d'outremer Français qui sont également soumis au Code Du Sport.

Suite à l'énoncé de ces nombreux constats, on peut réellement se demander comment et pourquoi nos chères élites ont mis en place une telle usine à gaz alors que le reste de l'Europe (et du monde) pratique cette activité avec, tout au plus, quelques règles basiques.


Le système juridique Français :

Pour bien comprendre toute la mécanique qui a permis de mettre en place notre CDS, il me semble important d'ouvrir une parenthèse sur le fonctionnement du système juridique Français. Les explications suivantes resteront cependant basiques et se limiteront à la découverte de quelques grands préceptes qui dictent notre droit national.

En droit français, les textes juridiques sont hiérarchisés. C'est-à-dire qu'il existe un ordre de priorité, d'importance pour rédiger les textes (pyramide du droit). La notion de texte fait référence aux lois, décrets, arrêtés et circulaires qui doivent tous se compléter sans jamais se contredire (ce qui n'est malheureusement pas toujours le cas). En tête de ces différents textes on retrouve la constitution qui est le plus haut degré dans notre ordonnancement juridique et qui constitue la base du fonctionnement de l'état.

Les lois sont discutées puis votées par le Parlement (assemblée nationale et sénat). Une loi doit, bien sûr, se conformer à la constitution. Le Conseil constitutionnel est d'ailleurs là pour veiller à ce que les lois restent dans l'esprit de ladite constitution.

Une fois votée, une loi est souvent déclinée par des décrets pour en préciser les contours et/ou les modalités. Les décrets sont rédigés par le gouvernement avec la signature du président ou du 1er ministre. Le décret doit être conforme à la loi et ne pas la contredire (toujours la hiérarchie des textes !).

Enfin, arrive l'arrêté qui est un acte administratif et peut être pris par un ministre, un préfet ou plus simplement un maire. Un arrêté est de portée générale (qui s'applique à tout le monde) ou individuelle (qui s'applique à une zone géographique ou à une activité spécifique). Tout le monde connaît la notion d'arrêté municipal qui est pris par le maire de la ville (s'applique à une zone géographique) ou plus précisement pour nous plongeur les arrêtés que l'on retrouve dans le code du sport et qui s'appliquent à notre activité.

Cette introduction juridique nous amène maintenant au sujet qui nous intéresse. Mais alors pour bien comprendre, qui rédige les arrêtés plongée ?

Pour notre activité les arrêtés sont tout simplement rédigés par des fonctionnaires de notre ministère de tutelle, avec consultation, d'un spécialiste de l'activité. Le ministère n'a, comme on peut s'en douter, aucune compétence de l'activité. C'est pour cela qu'il va devoir s'appuyer sur un expert en la matière. L'expert aura également pour mission de proposer des textes aux fonctionnaires du ministère qui rédigeront ensuite l'arrêté final. Dans ce processus, le principal interlocuteur et spécialiste du ministère pour l'activité plongée est sa fédération délégataire, c'est-à-dire la FFESSM. Les arrêtés résultants, une fois entérinés, sont signés par le ministre des Sports en poste ou par son représentant.

Que les textes soient issues de propositions de la FFESSM (avec retoquage des bureaucrates) ou directement sortis de la cervelle de quelques fonctionnaires imaginatifs, le ministère restera toujours le maître du jeu et celui qui approuvera l'acte final. En matière juridique, le ministère est et restera omnipotent.

Nous voilà arrivés à la fin de cette parenthèse juridique et on constate que les échanges sont donc limités à deux acteurs dont un n'a aucune connaissance de l'activité et l'autre n'a comme principal intérêt que de rester le maître du jeu en France. Certains pourraient croire que, à l'identique des textes de loi votés à l'assemblée, il y a un dialogue entre différents acteurs/partis et qu'une certaine démocratie s'applique. Dans notre cas, il n'existe aucune démocratie, aucune discussion ou échange avec d'autres entités (ou alors juste pour la forme). Deux acteurs uniques dictent les règles, de façon unilatérale, pour la majorité. Il va de soi que la FFESSM n'hésitera pas à vous expliquer qu'à elle toute seule elle représente cette majorité et qu'il n'y a donc aucune inquiétude à avoir. Comme le dit l'adage, les promesses n'engagent que ceux qui y croient !

Certains pourraient croire qu'il y a les syndicats professionnels comme le SNMP ou encore l'ANMP qui seraient (un peu) là pour veiller au grain. Malheureusement, les syndicats n'ont pour seul intérêt, que ceux des gens qu'ils représentent, c'est-à-dire les pros. Mais de toute façon, faudrait-il encore qu'ils aient la parole. Fut une époque, il y avait bien le comité consultatif de la plongée où ces derniers avait un droit de parole. Mais depuis 2009, le ministère a décidé de façon unilatérale qu'il n'y aurait qu'un seul interlocuteur, sa fédération délégataire. Bref, retour à la case départ avec uniquement deux protagonistes qui ont pour intérêt que; leurs propres intérêts, très éloignés de ceux du plongeur de base.

J'espère que cette parenthèse juridique vous aura permis de mieux comprendre pourquoi les différentes moutures du CDS ont fait couler autant d'encre par le passé. Le plus inquiétant est que les prochaines moutures n'ont aucune raison de ne pas suivre une voie, en tout point identique... Et chaotique.

L'état tient donc une part de responsabilité importante dans ce qui peut s'apparenter aujourd'hui à un millefeuille règlementaire. Devant cette maladie française qui est de croire que tout se résout à coup de réglementation, il est facile de comprendre que les couches n'ont pas fini de s'empiler.


Après ce petit intermède juridique qui nous a donné l'occasion d'identifier un des nœuds du problème revenons vers un sujet plus familier et qui concerne plus particulièrement notre fédération sportive.

D'un côté, nous avons le code du sport et l'initiateur de sa rédaction (le législateur) mais comme dans tout bon polard, il nous reste à trouver le marionnettiste ou le complice à qui profitera l'opération et qui en tirera tous les bénéfices. Bien malheureusement dans l'histoire présente le suspense ne dépassera pas ces quelques lignes, car nous connaissons tous le complice voire même celui qui a souvent été l'instigateur. Je dis souvent, car comme expliqué dans l'intermède juridique précédent, les rôles peuvent être inversés.

Le point de départ de la règlementation reste l'état. Mais la fédération est celle qui propose le gros des règles et/ou vérifie puis avalise les propositions de projet de modification du Code Du Sport. L'état (le MJS) peut également faire des propositions, mais elles resteront généralement limitées, car ce dernier n'est pas le spécialiste de l'activité et la loi (Code du sport - Article R322-7) l'oblige à consulter sa fédération délégataire. Consulter, veut bien dire que, dans tous les cas, le maître de la partie reste le ministère des Sport.

Pour tout ce qui est lié à la réglementation, les dirigeants fédéraux sont toujours restés très discrets au sujet des véritables raisons de leur politique. Cependant, l'histoire de la FFESSM, à toute époque, a été secouée par d'innombrables guerres de pouvoir dans les plus hautes sphères. Les péripéties de la FFESSM n'ont rien à envier aux guerres féodales d'antan avec les méchants et les gentils, les traîtres, les félons, les couards et j'en passe (genre Game Of Thrones). Toutes ces histoires ont, bien sûr, permis d'en apprendre plus que ce qui est rapporté par le canal officiel. Aujourd'hui, les véritables raisons de la mise en place de notre CDS (d'un point de vue fédéral) sont de notoriété publique même si la finalité restera toujours démentie par les élites en place et autres administrateurs de la pensée unique.

Entre un état paternaliste/protectioniste et une fédération opportuniste et égocentrée, les raisons de la mise en place du code du sport plongée sont nombreuses et nous pouvons, ci-dessous, en énumérer les principales :


Sur les derniers points énumérés ci-dessus, on peut s'étonner que la France ait pu instaurer au sein de l'Europe un régime de la plongée que l'on pourrait qualifier sans mal de totalitaire (fédération toute-puissante). Cela pourrait sembler excessif, mais à la lecture de la définition "Un régime politique dans lequel un parti unique détient la totalité des pouvoirs et ne tolère aucune opposition" nous sommes obligés de nous rendre à l'évidence que cela colle assez bien à ce que nous vivons dans le cadre de notre activité hexagonale.

Pour enfoncer le clou, on peut signaler que la France a réussi à obtenir une dérogation à titre permanent pour trois professions en particulier (moniteur de ski, moniteur de plongée sous-marine et moniteur de parachutisme), auprès de Bruxelles, afin de limiter la libre circulation des membres européens. Pour ces activités, l'état français impose des épreuves d'aptitude aux migrants qui souhaiteraient s'installer sur notre territoire. Il se justifie, en évoquant le caractère dangereux des disciplines sportives concernées, celui-ci étant accru par les éléments liés au milieu par nature aléatoire où se déroule ces activités. Bizarrement, la Commission européenne ne s'inquiète pas trop de savoir pourquoi ces professions présentent un danger particulier en France et pas dans les autres pays de l'union !

De cette triste réalité, on doit cependant bien différencier les objectifs distincts des deux protagonistes, mais qui se traduisent concrètement par une même finalité sous la forme d'un arrêté réglementaire. D'un côté, nous avons l'état sécuritaire enfermé dans sa vision passéiste et obsolète de l'environnement spécifique (unique en Europe et dans le monde) et qui cherche, à tout prix, à protéger (infantiliser) le citoyen par un contrôle règlementaire de l'activité. De l'autre côté la fédération délégataire qui a pour principal dessein de garder un contrôle de l'activité et d'imposer (délégation de l'état) sa vision stratégique afin de préserver son système face au reste du monde (règlementation). Grâce au CDS et à la délégation de l’état, les instances fédérales peuvent ainsi garder le monopole de l'activité en France en prenant en otage les plongeurs de l'hexagone, mais aussi en muselant toutes formes potentielles d'opposition comme les syndicats professionnels. Pas de doute, nous sommes bien dans une forme de totalitarisme qui n'ose pas dire son nom !

Dans le microcosme de la plongée française d'autres organisations se sont insurgés contre ce système développé au principal profit de la fédération délégataire. Quelques syndicats ont bien essayé de faire valoir leur point de vue, mais devant le mutisme et l'inflexibilité des instances administratives le combat n'avait que peu de chance d'aboutir. Comme aperçu, on peut lire le courrier envoyé par le président du SNEPL à La Ministre de la Santé et des Sports en 2010 (Roselyne BACHELOT). Depuis la rédaction de ce courrier, la situation de la plongée française n'a pas bougé d'un iota et ne changera probablement pas sauf évènement exceptionnel.

Le CDS français est unique dans le monde ou presque, car il existe un autre territoire français qui a la particularité d'avoir une autonomie administrative qui lui permet d'échapper au dictat de la métropole. En effet, si nous regardons du côté de la Polynésie française, on remarquera que l'administration locale a copieusement retravaillé le CDS français (avec son correctif du 8 août 2019, brevets PADI, SSI, SDI, NAUI, ADIP inscrit en clair) pour l'adapter à son environnement. Le point marquant du CDS de cette collectivité d'outre-mer est que les brevets des écoles nord-américaines accèdent aux mêmes limites et compétences (hors DP) que leurs homologues français (voir les annexes II et III pour les encadrants puis VII à IX pour les plongeurs). La plongée à l'air étant limitée à la profondeur de 50 mètres en Polynésie française. Ouverture oui, mais à quel prix ?

En effet, s'il est rassurant de constater que le gouvernement polynésien a su faire preuve d'ouverture et d'un poil de pragmatisme, on ne peut que déplorer qu'il n'est pas choisi la voie de la simplification pour une meilleure lisibilité et compréhension comme aurait pu le faire n'importe quel esprit cartésien. Sur ce dernier point, on retrouve là tout l'entêtement caractéristique des grandes administrations françaises dont l'aboutissement est un arrêté qui a enflé jusqu'à l'indigestion (33 pages contre 17 pour le CDS français !). Course à la boulimie réglementaire avec la métropole ???

L'adage "pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué" trouve déjà tout son sens en France, mais encore plus chez ses rejetons. L'élève, aurait-il dépassé le maître !

Sans entrer dans le détail, la Nouvelle-Calédonie a également rédigé ses arrêtés plongée pour une ouverture à toutes les écoles, mais sans se laisser entraîner dans l'excès Polynésien.

La plongée qualifiée de "libre" :

Suite à cette entrée en matière très instructive, des gens bien intentionnés nous feront certainement remarquer que la plongée est libre en France et que le CDS ne s'applique qu'aux structures d'APS (Activités Physiques et Sportives). En effet, un particulier peut très bien prendre son scaphandre et aller plonger comme bon lui semble sans tenir compte du CDS. Cependant, il faut bien noter que la plongée ne se pratique pas sans un minimum de moyens matériels et financiers et avec un élément quasi-incontournable qu'est le bateau !

De cette dernière remarque, il est donc facile d'en déduire que l'écrasante majorité des plongées se font dans des structures d'APS (structures commerciales et associatives) car à combien pouvons-nous estimer le nombre de plongées réalisées à partir d'embarcations de particuliers (ou du bord) par rapport au nombre total de plongées réalisées en France ?
L'autonomie en matière de plongée a, en effet, un coût que de très rares particuliers sont en mesure de supporter. Les plongées en réelle autonomie sont donc clairement négligeables au profit des structures d'APS qui apportent toute la logistique indispensable.

Pour confirmer cette déduction, on peut se référer aux dernières enquêtes menées en France (Etude nationale de 2005, Etat des connaissances des activités plongée méditerranéenne en 2014). On apprend que la plongée en structure s'offre la part du lion avec un taux culminant à 84%. Les 16% restant du hors structure se partagent entre les plongeurs scaphandre, les chasseurs, les apnéistes et enfin snorkeleurs. Dans ce groupe la plongée scaphandre ne représente qu'à peine plus du quart (27%). Ramené au total (structure et hors structure) un rapide calcul nous montre que la plongée scaphandre dite libre ne s'élève qu'à un tout petit 4% (27% de 16%).

Ces chiffres peuvent s'expliquer en regardant les bilans annuels de la FFESSM qui nous montrent la répartition par niveau des plongeurs. Elle se décompose comme ceci : 64% de N1, 24% de N2 et 11% de N3. Ces valeurs incluent également les aptitudes PA/PE délivrées. Le % manquant (64+24+11=99) est éparpillé dans les 3 catégories (valeur arrondie par défaut). Avec 64% de plongeurs non autonomes et 24% qui ne le sont que partiellement il parait évident que ces gens se tourneront vers des structures pour les encadrer, mais aussi les fournir en matériel. En effet, la très grosse majorité des plongeurs ne possède pas ou très peu d'équipement.

En synthèse pour la plongée dite "hors structure", il apparaît que nous nous trouvons bien dans le cadre d'une liberté relative, car fortement limitée par les moyens matériels et financiers à mettre en œuvre. Léger détail qui n'a évidemment pas échappé au législateur, ni a ses acolytes bien-pensants.

À noter tout de même que certaines pratiques marginales échappent à cette belle chienlit comme la plongée souterraine ou archéologique (voir entête du CDS). Mais resteront-elles indéfiniment écartées du champ d'action de nos deux comparses ?

Pour revenir au sujet de la plongée entre amis (donc officiellement libre car hors CDS) je vous invite à visionner une des nombreuses et très intéressantes interventions de Philippe Schneider (expert auprès des tribunaux, Instructeur fédéral national, rédacteur pour la revue Subaqua) lors de colloques FFESSM (février 2016, colloque de la CTR Bretagne Pays de Loire) et qui conclut que même dans le cadre de plongées réalisées hors structures organisant la plongée, on ne peut pas transgresser délibérément (en connaissance de cause) les règles de sécurité (CDS et/ou règles fédérales).

Cela veut dire que si vous souhaitez plonger en toute liberté, allez plonger seul ou entre autonomes (niveau 3 mini). Dès qu’un groupe est constitué (2 personnes suffisent) et surtout avec des niveaux et expériences disparates la notion de dépendances et donc de responsabilité envers autrui apparait avec les conséquences possibles que l’on connaît au regard des lois (CDS inclus).

Analyse de quelques articles du CDS

Après cette longue introduction consacrée à la réglementation et sa philosophie je terminerais par des remarques formulées au sujet de quelques articles du code du sport. Je ne prendrais par la suite que des articles qui sont interprétables, ambigus ou encore qui fixent des obligations qui n'ont pas lieu d'être ou alors de façons trop restrictives. Ce choix des articles abordés n'est pas personnel mais bien partagé par beaucoup de plongeurs au cours des nombreuses discussions que j'ai pu avoir au fil de mes pérégrinations et lors de cas concrets sur le terrain ou encore tout simplement parce que ce sont des sujets régulièrement abordés sur les forums de discussion (généralement suite à un ou des problèmes rencontrés par l'auteur du sujet).

J'invite les lecteurs qui le souhaitent à m'écrire pour commenter les analyses suivantes, mais aussi et surtout pour m'apporter, à l'occasion, une autre vision ou point de vue qui me permettra d'enrichir l'existant. N'hésitez pas également à me proposer d'autres articles dignes d'intérêt.

Art. A. 322-72. - Sur le site de l'activité subaquatique, la pratique de la plongée est placée sous la responsabilité d'un directeur de plongée présent sur le lieu de mise à l’eau ou d’immersion de la palanquée.

Voilà un premier article pour lequel l'interprétation est souvent de mise. La question récurrente est : peut-on avoir plusieurs DP sur le même bateau ?
L'article précise bien "sous la responsabilité d'un directeur de plongée" qui semble être au sens général et donc, à priori, aucunement un et un seul. Cette phrase semble donc avoir le sens correspondant à "au moins un DP" mais pour d'autres plongeurs l'interprétation se fera au sens strict, c'est-à-dire "un DP et un seul".

Quand une structure pro accueille plusieurs clubs associatifs (groupes auto-encadrés), il est souvent de mise (contrat à l'appui) que ladite structure se limite à la fonction de transporteur. Les Directeurs de Plongée actifs sont donc ceux des clubs associatifs en présence. Il va de soi qu'aucun DP bénévole n'acceptera de prendre la responsabilité de personnes ne faisant pas partie de son club. À partir de ce moment, cela signifie que la notion de DP se conjugue au pluriel. Mais au vu des textes ceci ne reste malheureusement qu'une hypothèse !

Je passerais sur toutes les qualités et compétences demandées à notre malheureux DP qui prend, bien malgré lui, la fonction de gendarme du club pendant la durée de son office et va devoir endosser toute la misère du monde au détriment du plongeur qui est totalement déresponsabilisé voire infantilisé. Au fil des CDS on constate d'ailleurs que la misère a une fâcheuse tendance à s'amplifier et à se concentrer en un point. Ceci n'a d'ailleurs rien de nouveau et correspond au besoin de l'administration d'avoir en face d'elle UN responsable identifié sur qui se décharger ou plus exactement de désigner un bouc émissaire.

Intéressons-nous maintenant au texte suivant :
Lors d’une plongée aux mélanges, le directeur de plongée justifie également des aptitudes PN-C ou PTH-120 correspondant aux mélanges utilisés conformément aux annexes III-17a et III-18a.

Au-delà de la vraie plongée technique avec des équipements lourds et/ou avec des temps de plongée dépassant la normale n'importe quel DP (MF ou BE/DE) devrait-être en mesure d'organiser, sans formation spécifique lourde, des plongées de type loisir (60m max à l'air ou au nitrox) comme il se fait dans plus de 95% des cas en France. Les plongées réellement techniques et qui demandent de profondes connaissances, que ce soit à l'air/nitrox ou au trimix, restent vraiment minoritaires et limitées à quelques passionnés lors de sorties thématiques (plongées épaves, roches profondes, etc.) et généralement dans des centres spécialisés.

Aujourd'hui, un DE est obligatoirement PN-C à la sortie de sa formation. Mais ce n'est pas le cas de nombreux BE et de beaucoup de MF. Compréhensible pour un MF (bénévole) mais beaucoup moins pour un professionnel.

D'ailleurs, est-ce bien utile d'avoir suivi une formation PN-C pour autoriser un plongeur nitrox à plonger ou pour organiser les secours pour ce type de plongée ? Une simple information pour le DP, ne serait-elle pas suffisante ? Et d'ailleurs combien de professionnels ont réellement une expérience de la plongée nitrox et/ou trimix au-delà des quelques plongées (voire aucune) qu'ils ont effectuées lors de leur formation ?

Sur le sujet trimix on constatera aussi qu'avec le code du sport 2012 le DP trimix (en explo : E3 jusqu'à 70m et E4 au-delà) doit dorénavant être qualifié full trimix (PTH-120) et non plus trimix normoxique (PTH-70) comme c'était le cas dans l'arreté de 2010 pour la zone 0-70m. Comme évoqué dans mon premier coup de gueule, on constate globalement dans les arrêtés successifs une surenchère des qualifications amenant à une surqualification inutile qui freine la pratique de l'activité. Quel club n'a jamais été confronté au problème de trouver un DP suffisamment qualifié pour organiser la plongée ?

Du même ordre d'idée que précédemment, on peut se demander pourquoi un moniteur 1er degré (E3) qualifié full trimix (PTH-120) ne peut pas avoir la responsabilité d'organiser des plongées explo au-delà de 70 mètres ?
Quelle(s) compétence(s) peu(ven)t réellement manquer à notre 1er degré full trimix par rapport à un second degré (à expérience égale) pour organiser ce type de plongée (nous ne sommes pas sur de l'enseignement, mais bien de l'explo) ?
La compétence est beaucoup plus liée à l'expérience de l'activité qu'au brevet de moniteur. En-tout-cas voilà un mystère que je n'ai jamais élucidé, du point de vue technique, bien sûr.

En fait la raison qui a imposé d'avoir un second degré qualifié full trimix est tout simplement à aller chercher du côté du législateur (les fonctionnaires du ministère des Sports) qui, comme à son habitude, aime à surenchérir à chaque nouvelle mouture du CDS en imposant des qualifications surdimensionnées pour se convaincre d'assurer pleinement la sécurité des pratiquants. L'explication de la démarche est simple; n'ayant pas les compétences adéquates pour juger, le législateur préfère abuser de l'adage : "qui peut le plus peut le moins" !
La fédération délégataire validera cette démarche qui s'accorde parfaitement avec un des objectifs qu'elle affectionne particulièrement, valoriser les brevets par la reconnaissance de nouvelles prérogatives.

Art. A. 322-74. Le Guide de Palanquée
Lorsqu’au moins un des plongeurs encadrés ou la personne encadrant la palanquée utilise un mélange autre que l’air, cette dernière justifie également des aptitudes correspondant aux mélanges utilisés conformément aux annexes III-17b, III-17c, III-18b et III-18c.

Dans cet article qui concerne le guide de palanqué, on peut appliquer les mêmes remarques que précédemment sur les qualifications Nx et Tx demandés au guide. Nous sommes clairement dans le qui peut le plus peut le moins ou plutôt qui peut beaucoup plus peut beaucoup moins.

On se retrouve de nouveau dans une configuration vu précédemment où les raisons de la surqualification n’ont pas les mêmes fondements pour les fonctionnaires et sa fédération. L’état cherche avant tout à se justifier de la mise en place des mesures nécessaires à la sécurité des pratiquants (règlementation excessive et surqualification sont les principaux vecteurs) alors que sa fédération recherche principalement des critères démontrant l’excellence de ses formations et de son cursus (valoriser les diplômes par l'acquisition de compétences et de prérogatives). Dans tous les cas l’image, aujourd’hui largement flétrie (en France comme à l'étranger), que les élites cherchent à donner de leur système et de leur approche est malheureusement démodée voire ridicule et au final contre-productive pour la communauté. La politique prime sur le concret et l'efficacité sur le terrain.

Art. A. 322-77 : Espaces d’évolution et les conditions d’évolution.
Nous entrons ici dans le monde des PA/PE, qui permet un découpage fin des aptitudes (explication de l'origine de ces dernières dans l'encadré ci-dessous) mais qui, en corollaire, apporte aussi une complexité que beaucoup de plongeurs ont du mal à suivre sans parler des étrangers qui reste tout simplement stupéfait devant autant d'imagination (pour rester poli).
Sur les qualifications Trimix, on remarquera l'aptitude PTH40 qui aujourd'hui n'a pas de réalité dans notre modèle. Peut-être qu'une tête pensante de l'époque avait quelques idées derrière la tête qui n'ont jamais vu le jour ou alors ce fût inventé en prévision d'un futur rapprochement avec des qualifications étrangères (little joke !). Qui vivra verra !


La naissance des PA/PE :

suite à une plainte déposée par PADI (fin 2007) auprès de la Commission européenne concernant l'accueil en France des plongeurs étrangers (au motif d'un protectionnisme national), l'Etat français fut contraint de faire évoluer la réglementation de la plongée en France. En réponse à cette plainte et afin de trouver un subterfuge pour ne pas intégrer les brevets étrangers (RSTC) dans le CDS, la FFESSM mis en place un dispositif permettant d'accueillir tous les plongeurs quel que soit leur organisme certificateur. La réponse s'exprima dans le Code Du Sport 2010 par l'apparition des aptitudes PA et PE.


Concernant les PA et PE, on peut se demander comment les habiles concepteurs de ces aptitudes comptaient objectivement intégrer les plongeurs issus des écoles nord-américaines (PADI, SSI, NAUI, etc.). En effet, ces plongeurs ont été formés comme autonome pour une plongée sans décompression obligatoire et avec une évolution des profondeurs par tranches de 10 mètres (pour être précis, c'est 18, 30 et 40 mètres) alors que notre système fait tout l'inverse (plongée avec paliers de décompression et évolution par tranches de 20 mètres). La soi-disant intégration devenant donc par définition difficile, car les aptitudes n'ont aucun point commun avec les prérogatives nord-américaines.

La question qui en découle est : y avait-il vraiment une volonté d'intégration ?

Art. A. 322-80. Equipement des plongeurs
"En milieu naturel, chaque palanquée dispose d’un parachute de palier."

Ma première pensée (qui est également valable pour beaucoup d'autres articles du CDS) à la lecture de cette phrase est de me demander à qui peut bien s'adresser une réglementation qui explique (et impose), de façon arbitraire, à des plongeurs (autonomes)/moniteurs l'équipement qu'ils doivent emmener en plongée ?

Pourquoi une telle proposition dans un arrêté dédié à une activité de loisir ?
Problème de formation récurrent des plongeurs ? Manque de confiance du législateur dans les organismes de formation ? Irresponsabilité chronique du plongeur français ainsi que de l'encadrement ? etc.

D'ailleurs, si une palanquée est réellement autonome, les plongeurs ne devraient-ils pas tous emmener un parachute. Pour cela, il serait bon de savoir plus précisement à qui s'adresse ce texte ?
Une palanquée d'autonomes (N2, N3). Un moniteur avec son baptême. Un moniteur avec ses élèves (N1, 2, 3) ? En fosse, en mer, en milieu naturel particulier ?
Comme on le constate, les situations peuvent être diverses et variées et certaines réclameront un seul parachute, d'autres un pour chaque plongeur et encore d'autres aucun parachute.

Typiquement, que se passera-t-il en cas de perte de palanquée. Est-il envisageable pour un plongeur de faire surface sans s'être signalé au préalable. Selon l'arrêté, c'est un non-catégorique, car il demande justement, tel que l'on peut le comprendre, d'avoir au minimum un parachute. Cela veut donc dire que pour une palanquée d'autonomes ce n'est pas un seul parachute dans la palanqué, mais un par plongeur. Imaginons une perte de palanquée sur une épave profonde avec courant comme c'est souvent le cas sur le Donator en plein été avec des bateaux qui se croisent en surface dans tous les sens ?
Sans oublier qu'en cas de panne d'air ou de problème grave la convention est d'envoyer 2 parachutes oranges côte à côte ou encore un seul de couleur jaune.

Autre cas de figure. Une fosse de plongée de plus de 6 mètres est considérée comme milieu naturel (Art. A. 322-98). Ceci impose donc, en fosse, d'emporter au moins, un parachute par palanqué. Cela fait bien sourire nombre de guides de palanquée (et plongeurs autonomes) sauf le jour ou des inspecteurs se sont invités dans une fosse pour venir contrôler la bonne application de la réglementation y compris le parachute de palier !!!

En conclusion pour cet article : pourquoi le législateur impose un parachute ? Pourquoi ne ferait-il pas aussi référence au dévidoir/dérouleur pour les plongées profondes, à l'emploi systématique de 2 détendeurs séparés pour ces mêmes plongées profondes, au volume minimum de gaz à emporter suivant les situations ? Et pourquoi... et pourquoi.... Bref on pourrait en rajouter une liste complète de recommandations arbitraires !
Les plongeurs, n'ont-ils pas été formés pour être autonomes ?
Et le directeur de plongée qui est le dieu à bord, à quoi sert-il ?

Au final, est-ce que ce texte a bien sa place, dans sa forme actuelle, dans une réglementation pour une activité de loisir ?

Art. A. 322-99. Dispositions diverses
Sur décision de l’exploitant de l’établissement d’activités physiques ou sportives, une palanquée... justifiant des aptitudes PA-60 peut évoluer dans l'espace de 0 à 40 mètres en l’absence de directeur de plongée.

Avec le CDS 2012 fini les N3 à 60 mètres sans le fameux chaperon Directeur de Plongée. On découvre alors, en 2012, que les N3 sont des autonomes à surveiller de près selon le législateur.

Quelles peuvent en être les raisons :

Dans un de ses communiqués, le président JLB nous précisait que le législateur ne voulait, initialement, pas de plongée sans DP dans les structures d'APS. Du coup, limiter les N3 à 40m fut un compromis bien qu'aucune statistique ne vienne étayer cette configuration.

En résumé, ceci fût un choix unilatéral du législateur sans aucune justification (le règlement du chef !).

Autre texte intéressant :
L’exploitant est informé, avant la plongée, du choix du site de l’activité subaquatique par les plongeurs. Il entérine l’organisation mise en oeuvre pour assurer la sécurité des plongeurs et le déclenchement des secours.

Mazette ! L'exploitant est informé du choix du site. Pourquoi pas dans l'absolu. Et que se passera-t-il si le bateau décide de changer de site au dernier moment ? Faut-il en informer l'exploitant, surtout, s'il est resté à terre ? Doit-on alors annuler la plongée si on n'a pas les moyens de le contacter ?

"Il entérine l’organisation mise en œuvre", l'exploitant, président de club dans le cas d'une structure associative, peut très bien être un plongeur (simple niveau 1 par exemple) comme un non-plongeur. Est-ce qu'un non-plongeur, ou même un niveau 1 ou 2, est capable d'entériner une organisation ? Tout cela, n'est-il pas plutôt le rôle du DP si bien décrit dans les articles précédents ?

Voilà encore un texte bien loin de la réalité du terrain et qui amène beaucoup de questions !

Conclusion

Nous voilà arrivés à la fin de ce second billet d'humeur avec de nombreux éléments de réflexion sur le Code Du Sport plongée. Le plus triste dans tout cela n'est pas tant l'ambiguïté des textes, mais surtout le fait que ces derniers sont là figés, gravés dans le marbre depuis plusieurs années et le seront encore pour un temps inconnu et pendant lequel l'incompréhension et les interrogations perdureront. On découvre, sans grande surprise, que tous ces articles ont été fait à la va-vite par des fonctionnaires (téléguidés, pour la majeure partie, par la fédération délégataire) ignorants de l'activité et avec le minimum de relecture sans laisser le temps à des experts (de différentes obédiences) de réfléchir sur leur contenu.

Le CDS plongée est tout simplement à la hauteur des craintes que peut inspirer notre activité aux fonctionnaires et pour lesquels toute notion de risque/danger est à proscrire. De son côté la fédération délégataire a toujours su tirer profit, à son avantage, de cette faiblesse omniprésente de notre société pour mieux asseoir son autorité.

De plus et comme précisé au début de cette reflexion, nous sommes, pour beaucoup d'articles du CDS, dans l'organisation de l'activité qui, devrait être du ressort des agences de formation et non du législateur.

Toutes les problématiques cités dans ce billet ne sont malheureusement pas nouvelles, loin de là, car nous avons pu constater ces mêmes erreurs sur tous les arrêtés plongée précédents. Mais qui s'en étonnerait ?

En réalité, la plongée française n'a pas été développée par pur altruisme dans le but de faire plaisir à ses pratiquants, mais principalement pour servir l'intérêt personnel de ses organisations (FFESSM et ministère de tutelle en priorité, mais aussi les organisations professionnelles, les CREPS, etc.).

Nous voilà en présence de deux acteurs nostalgiques d’une époque révolue qui refusent toute évolution qui échapperait à leur contrôle et aurait surtout pour conséquence une perte d’influence et de reconnaissance qui sont leurs principales raisons d’être. Sous leur air bienveillant, le ministère des Sports comme la FFESSM ne sont rien d'autre que les fossoyeurs de la plongée française.

Cette petite réflexion sur la règlementation nous démontre clairement que l'état français et sa fédération délégataire ont fait le choix unique et assumé (par crainte, par peur, par besoin de se sentir utile et indispensable) de s'isoler du reste de l'Europe et plus généralement du monde entier. En arrière-fond il existe bien une volonté politique forte, des instances fédérales jusqu'à l'état, de contrôler l'activité en l'enfermant dans une bulle hermétique hexagonale.

Que pouvons-nous espérer si ce n'est l'espoir que dans un avenir pas trop éloigné, l'harmonisation des (très nombreuses) réglementations européennes amènent à l'abrogation pure et simple du CDS français avec l'ouverture du monde professionnel de la plongée à tous les instructeurs qualifiés sans distinction et ségrégation ?

La solution idéale serait que le ministère des Sports abroge cette notion absurde d'environnement spécifique (particulier à la France et unique dans le monde) et que la réglementation se limite à des généralités qui pourraient alors s'appliquer à tous indépendamment du modèle d'organisation de la plongée et des règles propres à chaque agence de formation. Ceci n'a rien d'utopique, car c'est tout simplement, une réalité que l'on retrouve dans tous les autres pays d'Europe. De façon plus générale, c'est aussi l'organisation du sport en France qui serait à revoir et qui crée de façon artificielle des monopoles qui engendrent des inégalités de traitement et autant d'inéquité.

L'objectif serait que chaque organisation de plongée puisse se développer indépendamment d’un modèle imposé et qu'une saine concurrence vienne redynamiser un secteur qui en a bien besoin. Sans oublier les gains énormes pour les pratiquants qui retrouveraient enfin la liberté de pouvoir choisir le mode d'apprentissage et de pratique correspondant le mieux à leurs attentes.

Peut-être pourrions-nous alors dire que la plongée est libre en France. Ce qui est malheureusement très loin d'être le cas aujourd'hui